Projet aux coûts pharaoniques et à l’issue plus qu’incertaine
La création d’une caisse-maladie publique nationale ou de 26 caisses cantonales occasionnerait des coûts estimés à près de deux milliards de francs, sans compter le transfert des données des assurés à la nouvelle entité, un défi qui semble d’ores et déjà insoluble. Un projet d’une telle ampleur présente par ailleurs de très nombreux risques. santésuisse partage les craintes des économistes de la santé et d’alliance santé. La création d’une caisse unique peut être qualifiée d’aventure à hauts risques, à l’issue plus qu’incertaine.
Les partisans de l’initiative pour une caisse-maladie publique veulent détruire le système actuel de 60 assureurs-maladie privés et le remplacer par une caisse publique gérée par l’Etat, mais ils ne donnent pas d’indications sur la nouvelle entité ni sur les modalités de passage du système actuel au nouveau. Or les initiants sous-estiment manifestement ce que représente un tel projet. L’ampleur de la démarche est mise en évidence dans l’étude de l’Institut d’économie de la santé de Winterthour, dirigée par le Pr Urs Brügger et publiée aujourd’hui.
Risques élevés et absence de plus-value
Les initiants promettent des primes moins chères grâce aux économies annuelles réalisées au niveau des dépenses publicitaires, de marketing et des provisions pour les intermédiaires commerciaux. En 2011, ces coûts s’élevaient à 77 millions francs (chiffres publiés par l’Office fédéral de la santé publique), soit 0,3% des dépenses à la charge de l’assurance-maladie sociale. Or les experts estiment à quelque deux milliards de francs les frais qu'occasionnerait le changement de système à lui seul. Les incertitudes sur le fonctionnement du nouveau monopole et les risques liés à un projet d’une telle envergure, en particulier au niveau de l’informatique, n’ont pas été pris en compte. Il faudrait donc plus de vingt ans pour compenser les coûts de changement du système. Ces coûts seraient à la charge de la population suisse, que ce soit sous la forme d’impôts ou de primes d’assurance-maladie. Par ailleurs, quelque 5’000 collaborateurs de caisses-maladie et leurs familles seraient touchés et devraient se déplacer dans un autre canton.
Fausse perspective
Les initiants font preuve d’aveuglement en promettant des primes moins élevées : en effet, rappelle Verena Nold, directrice de santésuisse, « 95% des dépenses de l’assurance-maladie de base concernent des prestations et servent donc à payer les factures émises par les médecins, les hôpitaux et d’autres fournisseurs de prestations. ». Les coûts d’administration des assureurs-maladie sont les plus bas de toutes les assurances sociales, même en tenant compte de la publicité, du marketing et des salaires des dirigeants. Le conseiller fédéral Alain Berset reconnaît lui-même que la caisse publique n’amènera aucune économie (émission 10 vor 10 du 10 octobre 2012).